Un film vient d'ГЄtre rГ©alisГ© sur les horribles crimes perpГ©trГ©s dans la ville de Woodsboro. A l'occasion de sa sortie, les meurtres reprennent de plus belle et Sidney, devenue Г©tudiante au Windsor College, semble encore ГЄtre visГ©e. Gale, l'insolente journaliste, toujours Г l'affГ»t de la moindre information, est Г©galement prГ©sente, tout comme Dewey, qui a Г©chappГ© miraculeusement Г la premiГЁre vague de meurtres. MalgrГ© son handicap, il tente de dГ©couvrir le mystГ©rieux tueur alors que les victimes s'accumulent dans l'environnement immГ©diat de l'Г©tablissement. Mais qui peut bien se cacher derriГЁre le masque du meurtrier. Les uns et les autres se perdent en conjectures.

Critique lors de la sortie en salle

Par AurГ©lien Ferenczi

Ceux qui ont vu le premier Scream n'ont pas pu oublier la scГЁne inaugurale. Un moment d'anthologie, Г ranger presto au panthГ©on des grands frissons de cinГ©ma, pas loin de la scГЁne de la douche de Psychose, tout Г cГґtГ© des cadavres ambulants de La Nuit des morts vivants. Une jolie jeune femme, seule, la nuit, dans une grande maison aux larges baies vitrГ©es, est harcelГ©e au tГ©lГ©phone par un inconnu. Il la voit, elle pas. Il joue avec sa future victime, lui pose des questions sur. le cinГ©- ma d'horreur. L'angoisse monte, lentement. Qu'elle rГ©ponde ou non Г ce quiz cinГ©philique, la nymphette ne gagnera pas grand-chose. Rien que la mort. Violente, sanglante. Car le tueur va frapper et commencer ainsi Г terrifier les habitants d'une petite bourgade de Californie, Woodsboro. Wes Craven jouait en virtuose avec nos nerfs. Plus profondГ©ment, plus subtilement que dans la moyenne des films d'horreur qui parient, eux, sur la surprise (le tueur cachГ© derriГЁre la porte) et le dГ©goГ»t (un beau carnage Г l'hГ©moglobine). Lui, non. SpГ©cialiste de l'Г©pouvante depuis son tout premier film (Last House on the left, en 1973, Г dГ©conseiller aux Гўmes sensibles), le cinГ©aste a toujours manifestГ© une rГ©elle ambition. traquer nos peurs secrГЁtes, enfouies. Peurs issues de l'enfance. Peur du croque-mitaine (Les Griffes de la nuit, c'Г©tait lui), des inconnus dans la cave (Le Sous-sol de la peur). Peur de l'invisible, peur du noir. Scream. Un grand film sur la menace. n'importe qui peut tuer n'importe oГ№. Comprenez que le mobile importe peu, et que le serial killer semble possГ©der le don d'ubiquitГ©. En prime, il prГ©vient qu'il va frapper. Ce qui ne change rien. il paraГ®t impossible Г arrГЄter. Tour de force. les meurtres eux-mГЄmes sont moins effrayants que l'attente qui les prГ©cГЁde. Car le mГЄme sentiment d'impuissance est partagГ© par la victime. et par le spectateur. C'est Г Г§a qu'on reconnaГ®t un cinГ©aste. SuccГЁs oblige, Scream 2 s'imposait. On ne rigole pas avec le box-office. A peine six mois aprГЁs la sortie du premier, le scГ©nariste Kevin Williamson (pas pour rien dans la rГ©ussite du numГ©ro 1) rendait sa copie. Avec la mГЄme volontГ© В­ c'est le cГґtГ© James Bond de la sГ©rie. В­ de frapper fort dГЁs les premiГЁres images. C'est dans la queue d'un cinГ©ma que commence Scream 2. un couple est invitГ© Г la premiГЁre d'un film. D'horreur, bien sГ»r. Son titre. Stab. Son sujet. les meurtres de Woodsboro В­ ceux que racontait Scream. Et, dans la salle, oГ№ les В« fans В» ont revГЄtu le masque du tueur (cet Г©trange visage, allongГ© et blafard, inspirГ© du cГ©lГЁbre tableau de Munch, Le Cri), la mort rГґde dГ©jГ. Faux film dans le vrai film (mais, en bonne logique, les images de Stab ressemblent comme deux gouttes d'eau Г celles du premier Scream !), vrai tueur glissГ© dans une foule de faux criminels. Wes Craven s'amuse, multiplie faux-semblants et fausses pistes. Jusqu'au clin d'oeil. Bien appuyГ©. Par exemple, l'un des personnages de Scream 2, Г©tudiant en cinГ©ma, lan- ce un cinglant В« Sequels suck. В» (В« Les suites, Г§a craint. В»). Une faГ§on de devancer la critique. Car Scream 2 commence lГ oГ№ s'est arrГЄtГ© Scream, et rГ©unit (dans un nouveau cadre, une bourgade de l'Ohio) les principaux survivants de la premiГЁre hГ©catombe. Sidney, la jeune hГ©roГЇne ; Randy, son fiancГ© cinГ©phile ; l'ambitieuse Gale Weathers, journaliste de tГ©lГ© aux dents longues, ainsi que Dewey, le flic timide et gaffeur. Tous confrontГ©s Г une nouvelle vague de meurtres en sГ©rie. L'Г©tudiant n'a pas tout Г fait tort. les ingrГ©dients sont exactement les mГЄmes, mais comme dans la plupart des suites (Г l'exception de La MalГ©diction, on le signale pour apporter notre contribution au dГ©bat inclus dans le film), la mayonnaise prend un peu moins bien. Les dialogues sont plus attendus, moins brillants. Les hГ©ros de Scream Г©taient des archГ©types В­ l'Г©tudiante gironde, la В« journaleuse В» arriviste В­ prГ©sentГ©s avec une certaine distance. Scream 2 s'Г©chine Г en faire de vrais personnages auxquels il faudrait s'attacher. La psychologie n'est pourtant pas le fort du film d'horreur. Surtout, il y avait dans Scream une rГ©flexion ironique sur le cinГ©ma d'Г©pouvante, partant d'une idГ©e maligne. pourquoi les personnages du film, ces teen-agers, chair Г pГўtГ©, prГЄts Г se faire trucider, n'auraient-ils pas eux-mГЄmes Г©tГ© des boulimiques de sГ©rie B, dissertant sur les mГ©rites des vidГ©os gore. Avec, Г la clef, des dialogues savoureux et le frisson de la fameuse В« mise en abyme В» du film dans le film. ils parlent de film d'horreur, ils sont dans un film d'horreur. Ce subtil systГЁme narratif permettait au passage de dГ©cortiquer les conventions du cinГ©ma d'Г©pouvante. Ici, il vire au pur procГ©dГ©. Guettez les rГ©fГ©rences. comme cette sГ©quence du Nosferatu de Murnau aperГ§ue en arriГЁre-plan. Heureusement, quelques scГЁnes d'angoisse offrent Г Wes Craven l'occasion de prouver qu'il n'est pas qu'un artisan du cinГ©ma de genre, mais bien un authentique crГ©ateur. D'abord, une gageure. faire surgir l'angoisse en plein jour, en plein air. Le tueur s'annonce, une fois de plus, par tГ©lГ©phone. il appelle d'un portable, au milieu d'un jardin. On le cherche, on se prГ©cipite sur quiconque se trimbale avec un cellulaire vissГ© Г l'oreille. Peine perdue. quand l'assassin surgit, c'est dГ©jГ trop tard. Assez terrifiant de penser qu'il n'y a nul endroit oГ№ l'on puisse se protГ©ger, que personne n'est Г l'abri. Et il y a d'autres moments forts oГ№ c'est de la mise en scГЁne, prГ©cise et inventive, que naГ®t le sentiment d'effroi. un personnage poignardГ© qui hurle, mais qu'on n'entend pas, car la scГЁne est vue Г travers la vitre d'un studio d'enregistrement (on pense trГЁs fort Г l'ironie baroque du cinГ©ma de Dario Argento, et c'est trГЁs bien !). Ou une sГ©quence de pur suspense oГ№ l'hГ©roГЇne doit s'extirper d'une voiture accidentГ©e en rampant sur le corps du tueur apparemment assommГ©. On frГґle l'exer- cice de style, la virtuositГ© gratuite. Mais quel brio. Axiome. le film d'horreur se fabrique souvent Г la chaГ®ne. Chaque succГЁs est pillГ©, chaque invention plagiГ©e, rГ©utilisГ©e jusqu'Г extinction totale de l'inspiration. C'est arrivГ©, par exemple, Г la sГ©rie des Freddy, rapidement dГ©clinГ©e en sous-produits de moins en moins intГ©ressants (Г l'exception du numГ©ro 7, repris par Wes Craven lui-mГЄme). Rien de plus logique que Scream 2 soit moins novateur, moins abouti que Scream. Г‡a baisse. Sauf que le niveau de dГ©part Г©tait assez Г©levГ©. Suffisant pour que cette suite apporte plaisir et frisson. Car la peur, cette sensation brute, essentielle, qu'il n'est pas dГ©sagrГ©able d'aller traquer de temps Г autre dans les salles obscures, est encore lГ. et bien lГ - AurГ©lien Ferenczi

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